Notre profession de foi : Ensemble pour une université ambitieuse et solidaire

L’obtention par l’UPPA d’un I-Site en 2017 a impulsé dans notre établissement une nouvelle dynamique de recherche grâce à des financements dédiés à l’énergie et l’environnement (E2S). Les équipes ayant contribué à cette réussite n’ont pas épargné leurs efforts. Cependant, la médaille a son revers : dans son volet managérial, l’I-Site proposait une vaste réorganisation des composantes et des services, qui n’était peut-être pas indispensable aux objectifs affichés du projet en termes de recherche. Cette réorganisation a été imposée à toutes et tous, et non sans douleur. Une enquête confiée à un cabinet indépendant a révélé qu’en 2018, 60% des personnels se sentaient fatigués, 56% stressés et 15% épuisés par les changements imposés (1). Et le « ruissellement » promis n’a pas eu lieu : les moyens se sont concentrés sur un tout petit nombre de chercheurs, créant ainsi de fait une université à deux vitesses.

En effet, la nouvelle organisation a été mise en place dans un délai si court que trop peu de discussions et de concertations ont eu lieu. C’est la conséquence de choix managériaux qui ont déconstruit pour reconstruire en rajoutant des strates et des niveaux et en faisant disparaître les espaces d’échanges et de discussions qui existaient, en particulier au niveau des équipes pédagogiques des départements.

Quel bilan peut-on tirer de cette vaste reconfiguration de notre université ? Pour nous, ce bilan s’avère négatif pour le personnel et les étudiant.es : songeons à la disparition des départements, à la séparation des niveaux Licence et Master/Doctorat, au fonctionnement du centre de ressources en langues (CRL), et à la restructuration de certains laboratoires en fonction d’axes thématiques spécifiques.

Les projets de « structuration », coûteux, inutiles et dangereux pour les libertés académiques à l’instar de la COMUE d’Aquitaine ont fait preuve de leur caractère antidémocratique, à la fois par leurs structures et leurs pratiques de pilotage par le haut. Avec l’échec de la COMUE d’Aquitaine, il est illusoire de croire aujourd’hui celles et ceux qui prônent l’excellence en imposant une vision unilatérale par le haut.

Face à ce constat, nous avons décidé de réunir de nouvelles forces et de constituer des listes, soutenues par le SNESUP-FSU, ouvertes à toutes celles et tous ceux qui croient et entendent œuvrer pour une université ambitieuse, exigeante, transparente et démocratique, véritablement au service des personnels et de la réussite de ses étudiant.es. Nous voulons réintroduire de l’humain et du bon sens dans cette organisation au travers de la collégialité et de la consultation des personnels : lorsqu’une évolution des structures, services, collèges ou laboratoires est nécessaire, elle doit aller dans le sens de l’amélioration du service public et des conditions de travail des personnels et des conditions d’étude des étudiant.es. Elle doit également toujours s’appuyer sur l’avis et l’expertise des personnels concernés.

Nous proposons donc :

  • une université dont la politique puisse être débattue par les personnels dans des instances représentatives partout élues et qui disposent d’une information complète et fiable. Pour cela, nous rétablirons les conseils en vrais lieux de débat et non en chambres d’enregistrement. Cela demande que les conseils soient préparés de manière collégiale, avec des modalités de fonctionnement clairement affichées. C’est pourquoi nous créerons des bureaux constitués de membres élus de toutes les listes ;
  • une construction, à partir de chaque composante et chaque laboratoire, de collaborations et de solutions qui fonctionnent pour penser de nouveaux projets. Ainsi, les échecs et erreurs passés doivent servir à enrichir l’élaboration de projets ambitieux et partagés par tous les personnels. Pour cela, nous consulterons les personnels sur les aspects positifs et négatifs de la nouvelle organisation afin de trouver un mode de fonctionnement dans lequel chacun puisse se retrouver. Cette consultation se fera sur une base périodique, et de la même manière que l’étude effectuée à la demande du CHSCT. Nous nous engageons à ce que de vraies conclusions en soient tirées à travers des mesures concrètes discutées en conseil ;
  • un sens du service public qui nous donne les moyens de bien faire ce que nous savons faire, que ce soit en enseignement, en recherche ainsi que dans le fonctionnement technique et administratif de l’université. Pour cela, nous veillerons à ne pas concentrer les moyens sur quelques axes aujourd’hui porteurs en sacrifiant des pans entiers de notre université. Notre université multi-sites ne peut jouer son rôle vis-à-vis de notre territoire que si elle reste réellement pluridisciplinaire. Conscients de notre responsabilité en tant qu’université de Pau et des Pays de l’Adour, nous veillerons à ce que cette politique pluridisciplinaire et équilibrée soit débattue et décidée dans les conseils.

Agir contre la dégradation des conditions de travail

Les réformes successives et l’austérité budgétaire très forte ont conduit à des réorganisations des services qui ont trop souvent abouti à une dégradation globale des conditions de travail de l’ensemble des personnels, à une perte de sens et une réelle souffrance au travail pour beaucoup, comme l’a montré l’enquête sur la nouvelle organisation commandée par le CHSCT.

A l’heure où la dégradation des bâtiments existants est patente, notre université reçoit des moyens considérables pour construire de nouveaux locaux recherche, alors qu’elle n’assume pas assez l’entretien de l’existant, et se montre incapable, dans certaines composantes, d’accueillir dignement les étudiant.es. Le bon sens devrait nous préserver du piège de la dévolution du patrimoine, qui permet à l’Etat de « donner » à l’université la pleine propriété des terrains et bâtiments qu’elle utilise. Avec pour elle le droit de les vendre, en contrepartie de l’obligation de les entretenir et de les développer en « pleine responsabilité ».

L’emploi précaire s’est trop développé et le recrutement de fonctionnaires doit rester la règle. Nous souhaitons que les personnels en statut précaire qui assument des tâches pérennes puissent être titularisés. La multiplication des statuts et des types de contrats de travail n’est ni soutenable à long terme, ni souhaitable moralement car elle crée des inégalités.

Nous proposons donc :

  • la poursuite, avec une détermination sans faille, des actions menées en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes à tous les échelons de l’université et de la lutte contre les risques psycho-sociaux avec l’affectation des moyens nécessaires. Pour cela, nous nous appuierons sur les avis du futur Comité social (fusion des CHSCT et du CT imposée par la réforme de la fonction publique);
  • l’affectation prioritaire des postes, dans le respect des règles établies, vers les composantes et les services, de manière à aussi prendre en compte la surcharge de travail au quotidien qui affecte les personnels, et non exclusivement sur des critères de politique scientifique liée à l’I-Site. Pour cela nous nous appuierons sur les conseils ;
  • le refus de la modulation à la hausse du plafond de 192 HETD pour les enseignant.es-chercheur.es ;
  • l’amélioration du bâti existant pour offrir des conditions de travail et d’étude décentes. Nous mènerons une gestion équilibrée du bâti qui ne priorise pas seulement la recherche.

Développer une politique scientifique ambitieuse à la hauteur des enjeux d’aujourd’hui et de demain

« La recherche a besoin de moyens, bien sûr, mais elle a aussi besoin de calme, elle a besoin de temps, de liberté et de confiance » (2).

Une politique de recherche de haut niveau dépend d’une visibilité à long terme donnée aux laboratoires et d’un ancrage disciplinaire fort. Dans un contexte où le fonctionnement des laboratoires dépend de plus en plus de financements sur projets, nous nous engageons à soutenir les laboratoires dans leur diversité disciplinaire et à les impliquer dans l’élaboration de la politique de l’établissement sur la base de relations de confiance. Si nous soutenons la réponse à des appels d’offres en fonction des exigences conjoncturelles, notre position est que cette stratégie ne doit pas mettre en danger le savoir-faire disciplinaire ou la pérennité de nos laboratoires. La liberté des sujets de recherche est de plus en plus mise à mal avec les partenariats obligatoires pour répondre à des appels à projets (ANR, H2020, région) qui influencent l’orientation de la recherche en privilégiant un utilitarisme à court terme. Dans un système où tout le monde est en compétition avec tout le monde, la créativité tend à disparaître des laboratoires.

Nous proposons donc :

  • une politique scientifique pensée à long terme. La stratégie de l’UPPA ne devra pas être exclusivement concentrée sur des axes prioritaires : elle doit rester diverse, librement portée par les personnels. Nous défendrons des politiques scientifiques et de ressources humaines qui privilégient les collaborations équilibrées entre universités, organismes de recherche, écoles d’ingénieur, IAE et IUT ;
  • l’indépendance des équipes pédagogiques, leurs libertés académiques en œuvrant pour une meilleure répartition des moyens ;
  • une politique équilibrée entre recherche et valorisation. Nous réaliserons un audit de la politique actuellement menée afin d’estimer les coûts et gains d’une stratégie de valorisation basée sur la SATT. Ce bilan, clairement affiché, sera discuté en conseil. Ceci permettra d’ajuster la stratégie de valorisation afin de dégager des marges financières qui pourraient être utilisées pour développer notre recherche et nos actions de formation.

Pour que le train de l’UPPA ne laisse plus sur le quai la majorité de ses personnels, l’I-Site, projet vital pour l’université, doit gagner le soutien de toutes et tous. Pour cela, il ne peut pas financer exclusivement les projets d’un petit groupe et doit permettre de développer les sujets autant en recherche fondamentale qu’appliquée. C’est pourquoi nous voulons dégager des moyens pour permettre aux collègues laissés en dehors de la dynamique actuelle de développer leurs activités. Nous proposons donc de créer des appels à projets avec des montants modestes, en consultant dans la transparence les équipes pédagogiques et de recherche de l’université et non exclusivement un comité restreint comprenant des extérieurs.

Se donner les moyens d’enseigner et de promouvoir la réussite de toutes et tous

L’une des principales missions de service public de l’université est celle de la formation et de la diffusion des savoirs. C’est une fonction émancipatrice, de promotion sociale, qui ne doit pas être fondée sur une discrimination par l’argent, ou par un quelconque critère social ou géographique. Cette mission est encore plus importante pour une université de proximité comme celle de Pau et des Pays de l’Adour, qui a un vrai rôle à jouer sur son territoire, avec une offre de licences et masters, mais aussi d’études en IUT, à l’IAE ou en écoles d’ingénieurs, et enfin de doctorats. Cela nécessite des moyens pour les équipes enseignantes et une politique volontariste, consciente des réalités de terrain.

Nous proposons donc :

  • la défense de la qualité de la formation de la première année au doctorat, sans sacrifier un niveau à un autre, et sans augmentation des frais d’inscription, y compris pour les étudiant.es étranger.es ; le développement des aides et bourses aux étudiant.es sur critères sociaux, ces dispositifs ne devant pas être seulement limités au périmètre I-Site ;
  • le maintien d’un lien fort entre enseignement et recherche passant par la recréation du lien entre les licences et les masters mis à mal par la restructuration des collèges et le découpage des départements en CIF (composante interne de formation) ;
  • la prise en compte de la diversité des besoins pédagogiques, selon les disciplines, et de la dynamique des organisations spécifiques, dans le respect de la loi (article L 713-9 pour les écoles et instituts);
  • le refus de la relégation de certains enseignements dans des services à vision utilitariste comme le CRL (Centre de Ressources en Langues) aujourd’hui, avec des personnels privés de l’élection de sa direction et du droit de vote dans les collèges ;
  • l’appui à la pédagogie qui ne confond pas affichage et moyens (cf. dispositif SPACE). Nous privilégierons le recrutement d’enseignant.es et le face-à-face pédagogique enseignant.es-étudiant.es sur toute forme d’enseignement à distance ;
  • un financement pérenne des formations qui ne soit pas tributaire d’appels à projets ou du développement de l’alternance et de l’apprentissage.

Nous nous engageons sur l’ensemble de ce programme et nous engageons aussi à être vigilant.es vis-à-vis des menaces graves que fait peser sur la recherche publique le projet de LPPR (Loi de programmation pluriannuelle de la recherche). Nous réaffirmons notre attachement au rôle central du CNU (conseil national des universités) et notre volonté de construire sur la base de la confiance une université ouverte démocratique, collégiale et ayant le souci du service public.

Pour une vraie démocratie : un projet et non une candidate ou un candidat

Parce qu’un projet démocratique doit être le produit d’un débat d’idées et émerger de la discussion avec celles et ceux qui œuvrent sur le terrain, et non pas une opération de communication autour d’un homme ou d’une femme supposé·e providentiel·le, nous avons fait le choix de ne pas présenter, dans un premier temps, un ou une candidat.e et son équipe mais bien un programme.

L’université démocratique que nous proposons commence ainsi dès maintenant. Dans les jours à venir, nous vous proposerons des temps d’échange. Nous vous présenterons notre vision de l’université. Nous viendrons aussi recueillir vos avis, vos idées, votre expertise et votre connaissance des situations concrètes, tous ces éléments qui feront de l’université «votre» université, et du projet que nous nous engageons à défendre dans les quatre années à venir, le vôtre.

Si cette liste l’emporte, un·e président·e et tous les membres de son équipe seront proposé·es en son sein et parmi ses principaux soutiens. Cette méthode se veut à rebours de toutes les habitudes, car elle se veut aussi un gage de notre volonté de sortir de l’individualisation et de la personnalisation au profit du collectif et du travail participatif.

(1) Rapport Technologia « UPPA, projet de nouvelle organisation », expertise CHSCT, octobre 2018.
(2) Viviane Pirenne-Delforge, Leçon inaugurale au Collège de France